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Serviès 14 mars 2020

Très belle journée ensoleillée ce samedi, j’ai bien rempli les cartes et profité du soleil. Maintenant j’ai un peu de temps pour identifier et faire le compte-rendu des espèces rencontrées de cette sortie, en attendant de pouvoir re-profiter pleinement de la nature qui nous entoure sans oublier de la respecter et de la protéger, elle aussi.

Nous commençons cette journée autour d’un lavoir.

La zone est très intéressante en particulier pour l’observation de quelques punaises semi-aquatiques.
Mais d’abord en arrivant, je remarque une grosse bête avec de longue pattes au pied d’une poutre en bois.

C’est un opilion, Phalangium opilio, nommé en Français Faucheux urnigère. Une grosse femelle, rapidement rejointe pas un mâle. Nous assistons à un début de parade nuptiale, le mâle caressant la femelle de ses pédipalpes. Cette dernière ne réagissant pas particulièrement, le mâle a fini par se lasser et s’en est allé.

En haut d’une poutre cette fois, cette araignée du genre Tetragnatha. On voit bien les deux rangées d’yeux parallèles. Ces araignées construisent souvent leur toile près des cours d’eau ou des zones humides.

Un syrphe du nom d’Eupeodes luniger se pose sur la végétation. C’est une femelle, avec les yeux espacés. Les larves se nourrissent de pucerons.

Sur la partie bétonnée au-dessus du petit bac, plusieurs de ces superbes mouches prennent le soleil. Ce sont des Liancalus virens. On les trouve souvent aux abord des cours d’eau. Elles sont prédatrices.

Au sol près de cet endroit, court une minuscule coccinelle de 2 mm. C’est une Scymnus interruptus, reconnaissable à ses grandes taches oranges triangulaires qui touchent les côtés des élytres et à son corps poilu. Ses larves se nourrissent de pucerons. La tête orange et les bords du pronotum de même couleur indiquent un mâle.

Passons maintenant aux zones en eau, dans le bassin principal.

Beaucoup de punaises du genre Velia se baladent à la surface. Ce sont des juvéniles, inidentifiables à l’espèce sur photo. Elles sont prédatrices. Sur cette photo, elle était en compagnie d’un petit collembole que je n’ai vu qu’en traitant les images !

Une plus jeune.

Une petite araignée a construit sa toile à la surface du bassin, sur la végétation flottante. Il s’agit d’une jeune Agelenidae, probablement du genre Agelena. D’ordinaire, leur toile est construite dans la végétation basse, sous forme de nappe avec une retraite tubulaire dans laquelle l’araignée attends ses proies.

La zone de l’autre côté du bassin est très intéressante, notamment les murs en mousse et la marche surélevée. Il faut faire très attention où on met les pieds car les hydromètres sont partout.

Les voici : Hydrometra stagnorum. Ils ont une forme bien particulière, très fine et allongée. Ce sont des prédateurs qui se nourrissent de divers petits invertébrés, vivants ou morts. Ils sont partout ! A la surface des bassins sur la végétation flottante, au sol, sur les murs en mousse…

Autre découverte sur le mur en mousse, ce cloporte : Orthometopon planum. Il était au début à moitié caché par la végétation. J’ai tenté de dégager cette dernière pour voir l’arrière de son corps, important pour l’identification. Il s’est laissé tomber à l’eau juste en dessous (3cm de profondeur). J’ai réussi à la rattraper avant qu’il ne s’enfuie, car (ce à quoi je ne m’attendais pas) il s’est mis à nager à toute allure vers le fond ! Le voici, sec avec la pruinosité grisâtre bien apparente, puis mouillé (la pruinosité n’est alors plus visible).

Une petite mouche aux allures de papillon arpente le sol. Elle appartient à la famille des Psychodidae, sous famille Psychodinae. Leurs larves se développent dans l’eau, y compris dans les fosses sceptiques ou dans l’eau qui stagne dans les canalisations. Ce qui explique qu’elles sont parfois présentes dans les maisons. Elles sont totalement inoffensives, que ce soit pour nous (elles ne piquent pas) ou pour nos stocks de nourritures ou encore nos vêtements.

De petites fourmis sont à la recherche de proies. Elles appartiennent au genre Tetramorium. Les nids sont souvent sous les pierres ou dans la terre. On les appelle communément « fourmis des trottoirs ».

Nous prenons ensuite la voiture pour aller au pied d’une première éolienne.

Sur un des poteau qui soutient la chaine de protection, une très grande punaise : la Punaise américaine du pin (Leptoglossus occidentalis). C’est une espèce originaire des États-Unis qui a été accidentellement introduite en Europe via l’importation de bois. Elle se nourrit sur divers conifères, et notamment sur les pins. Elle est facilement reconnaissable grâce à l’élargissement en forme de feuille sur son 3ème tibia.

Au pied même de l’éolienne, on trouve pas mal de choses. Ici une larve de coléoptère Carabidae Nebriinae, avec ses impressionanntes mandibules.

Une petite mouche vient se poser. C’est une tachinaire, du nom de Triarthria setipennis. On la reconnait à ses larges et grandes antennes et à l’arista (le petit filament qui pars de l’antenne) articulée. Ses larves parasitent les perce-oreilles. Une fois sorties de l’oeuf, elles recherchent un hôte et pénètrent à l’intérieur de leur corps en passant par l’articulation tête/thorax ou thorax/abdomen.

Un petit coléoptère avec une allure particulière : Leptaleus rodriguesi, famille Anthicidae.

Une toute petite araignée, de la famille des Agelenidae (décidément !). Certainement une Eratigena ou une Tegeneraria.

J’aperçois un petit point noir qui court à toute allure. En faisant des images plus rapprochées je me rends compte qu’il s’agit d’une petite guêpe. Elle appartient au genre Gryon. Les femelles pondent dans les œufs de punaises, la larve se nourrissant de l’embryon. Ensuite, ce ne sont pas des punaises qui sortent de l’œuf mais des Gryon !

On fouille ensuite dans une ornière juste derrière l’éolienne.

Il y a des Isotomidae partout ! En voici un, du genre Isotomurus, peut-être un Isotomurus pseudopalustris de forme claire (mais ce genre est délicat à identifier, surtout lorque les individus n’ont pas de dessins caractéristiques).

Sous une feuille de chêne dans l’ornière, se trouve tout un groupe de Bourletiella hortensis. Ils sont très petits, moins d’1 mm pour la plupart.

Plusieurs petites taches rouges se baladent sur le sol. ce sont des acariens de la famille des Bdellidae, des prédateurs qui apprécient beaucoup les collemboles.

Autre collembole lui bien plus grand (3 mm environ), Orchesella quinquefasciata. Il est également très poilu.

Un autre assez petit et joliment rayé : Isotomurus ghibellinus. Sur l’une des deux photos, il est en compagnie d’un autre petit collembole violet, peut-être un Stenacidia violacea ou un Sminthurides.

Autre prédateur, bien plus gros (entre 4 et 6mm). Un Carabidae qui se nomme Notiophilus quadripunctatus. Il a de très gros yeux pour mieux repérer ses proies.

Autre curiosité : une larve d’Enoicyla pusilla. C’est un Trichoptère, normalement les larves de ces insectes sont aquatiques. Mais celle-ci s’est bien adaptée à la vie terrestre. Les femelles adultes de cette espèce sont aptères, c’est à dire qu’elles n’ont pas d’ailes, tandis que celles des mâles sont normalement développées. La larve vit dans un fourreau fait de petits graviers, parfois agrémenté avec des végétaux.

Un petit coléoptère de 2mm sauvé des eaux de l’ornière : Lissodema lituratum. On les trouve sur et sous les écorces des branches mortes de divers arbres et arbustes attaqués par d’autres coléoptères.

Je fouille un peu dan la végétation autour de cette zone. Plusieurs Heliophanus se baladent dans les hautes herbes, dont cette Heliophanus cupreus.

Sous un caillou, un jeune Armadillidium nasatum. Chez les adultes, la lame frontale, en avant de la tête, est bien plus saillante.

Plus loin, un tas de bois nous occupera un petit moment.

En inspectant les branches, nous observons pas mal de collemboles. Ce Tomocerus minor (il y en avait beaucoup).

Il y avait aussi beaucoup de Dicyrtomina ornata.

Puis ce très petit Sminthurinus niger.

Dans la mousse, toute une flopée de Penthaleus longipilis.

Nous continuons vers une vieille souche.

Sous un morceau, ces larves de Cixiidae (sorte de cicadelles) avec leurs froufrous au derrière.

Il y a même quelques Lézards des murailles qui prennent le soleil.

Sous une pierre cette fois, ce perce-oreille du nom de Euborellia moesta. Ici c’est un mâle, avec les cerques (pinces) divergents à la base et 10 segments abdominaux. Les femelles ont les cerques plus droits et seulement 8 segments abdominaux.

Autre surprise sous un petit caillou. Cette femelle bien portante d’Euophrys rufibarbis. Le nom de rufibarbis fait référence au mâle, qui a la face recouverte de poils rouge vif.

Nous arrivons aux abords de la dernière éolienne que nous visiterons et qui n’est pas visible sur cette photo puisqu’elle est juste sur la gauche).

C’est dans la petite montée sur la droite de l’image que j’ai photographié cette superbe saltique : Phlegra bresnieri.

Au même endroit, une Cicindèle champêtre (Cicindela campestris) galope sur le sol. Je la suis un moment, guettant les rares moments où elle s’arrête. Puis j’arrive à faire quelques clichés. Ses couleurs sont sublimes, et ses mandibules énormes !

Autour de l’éolienne, une Pyrale des buissons (Pyrausta despicata), dont la chenille se nourrit de plantain.

Une Osmie cornue (Osmia cornuta) se repose aussi au sol. Elles sont très nombreuses en ce moment autour des hôtels à insectes !

Deux gros acariens se battent… Ce sont des Allothrombium, pour l’espèce c’est plus compliqué. Ils sont assez gros et communs, vous avez déjà du en voir. Leurs larves parasitent les pucerons.

Un drôle de papillon que l’on observe dans les zones boisées en début de saison : la Chimabache du hêtre, Diurnea flagella. Ici c’est une femelle, aux ailes réduites et inapte au vol. Elle court par contre assez vite. Les mâles ont des ailes normalement développées.

Un petit Curculionidae, appelé plus couramment charançon. Anchonidium unguiculare. On le trouve généralement dans la litière des feuilles dans les forêts de chênes.

Un autre Curculionidae bien plus grand, Dorytomus longimanus. C’est un mâle, avec de si grandes pattes 1. Les larves minent les bourgeons des peupliers.

Celui-ci a comme un air de famille avec le précédent mais ce n’est pas un Curculionidae, c’est un Brentidae (ces deux familles sont tout de même très proches). Il appartient au genre Exapion et mesure 2mm.

Une journée bien remplie et riche en découvertes, comme à chaque fois. Il y a tant à découvrir à deux pas de chez nous ! C’est le moment d’inspecter le jardin, et pour les personnes qui n’ont pas cette chance, je suis sûre que même sur un balcon on peut faire des découvertes. Y rajouter quelques végétaux et un hôtel à insectes augmentera les chances d’observer des insectes et autres petites bêtes !
Prenez soin de vous et de vos proches.

11 commentaires sur “Serviès 14 mars 2020”

  1. Ralala… J’ai l’appareil photo qui me démange… Ici, on est confiné… pas question de partir en forêt et ce n’est l’envie qui manque… Je me contente des arachnides du jardin… c’est déjà ça !!
    Toujours aussi impressionné par tes identifications… d’arachnides car pour le reste je suis nul !
    Quelle chance aussi d’être dans ton coin… belle diversité pour un mois de mars !!
    J’attends ta balade suivante alors… :-))

    1. Merci Richard !
      Pour l’identification je m’aide beaucoup du forum insecte.org et poste souvent pour demander aide et/ou vérification.
      Pour ce qui est du confinement, c’était la balade d’avant la nouvelle. Confinée ici aussi, heureusement que j’ai un petit jardin mais ce n’est quand même pas pareil…
      J’ai aussi photographié quelques araignées chez moi, dont Dysdera crocata (c’était ma première) qui est vraiment une belle bête ! Il y en avait plusieurs cachées sous des pots.
      Espérons que tout s’arrange très vite.

  2. Bonjour je découvre votre site après avoir suivi une araignée de ma maison et cherché à l’identifier ! (zoropsis spinimana ) . Beaucoup de photos qui sont souvent très belles. Des commentaires à la fois légers et sérieux et l’impression de se promener avec vous.! Bravo bravo ! Je me suis inscrite à votre blog. Et j’ai déjà commencé à diffuser votre adresse.

    1. Bonjour,

      Ah les Zoropsis, de grandes copines dans les maisons l’hiver ! Elles sont toujours impressionnantes !
      Un grand merci pour votre mot et vos compliments, ainsi que pour la diffusion 🙂

      En espérant pouvoir bientôt partager de nouvelles promenades.

      A bientôt,
      Jessica

  3. Bonjour Jessica
    Merci pour votre réponse. J’aime quand on parle des araignées comme de copines 😂😂
    Concernant votre site vous a t’on déjà fait la remarque comme quoi l’affichage du menu lettres noires sur fond brun est très difficile à lire ?
    Ça fait référence aux couleurs des zoropsis😉 mais en tout cas sur ma tablette ou mon tel c’est quasi illisible..
    En tout cas merci pour votre précieux travail.
    J’ai poursuivi ma lecture hier et ai découvert les pages d’identification par familles. Très chouette.

    1. Bonjour,

      On ne m’avais jamais fait la remarque mais je l’avais vu en effet. C’est depuis que j’ai changé de thème.
      Le souci c’est que comme je suis sur wordpress.com et pas .org (j’aurais du mieux me renseigner à la création du blog) je n’ai pas énormément de libertés pour l’apparence du site. La couleur des titres est la même pour les versions tél/tablette et ordi. Alors que sur l’ordi le fond est blanc et sur tablette le fond est noir… lol ! Donc si je mets trop clair ça ne sera pas visible sur ordinateur.
      J’ai quand même tenté d’éclaircir la police des titres en gardant un contraste convenable pour la version ordi. Normalement ça devrait être plus lisible maintenant ?

      Merci pour ce retour en tout cas 🙂

      1. oui c’est déjà mieux!
        Compliqué de s’en sortir avec ces logiciels de blog..
        Au plaisir de vous lire à nouveau. bon après-midi

  4. Salut Jessica,
    Tes photos du Petit Monde sont vraiment dingues !!! C’est magnifique, j’imagine aussi le boulot pour tout identifier… Tu utilises quoi comme objectif si ce n’est pas indiscret ? Un MP-E 65 mm ? Les photos de cicindèle champêtre sont à tomber ! Merci pour le partage.
    Amitités
    Seb

    1. Salut Sébastien,
      Merci beaucoup ! Oui le boulot d’identification est énorme mais j’adore ça !
      Sur cette sortie là oui je n’ai utilisé que le MP-E 65 mm. Mais j’ai aussi le 100mm macro que j’utilise pas mal. Tu peux voir quel objectif j’ai utilisé en regardant les galeries sur chaque fiche espèce, les exifs apparaissent sur la droite lors de l’affichage. Mais c’est moins pratique c’est vrai, et sur les articles cela n’apparait pas.
      Pour la cicindèle j’ai eu la chance qu’elle reste immobile un moment, j’ai pu faire du focus stacking (je fais ça à main levée, donc cela ne marche pas à tous les coups, tant que l’insecte ne bouge pas d’un poil ça va !).

      1. Super, merci pour le tuyau sur les exifs Jessica, en fait sur Safari je ne les vois pas mais sur Firefox c’est bon oui :))
        Vu les facteurs d’agrandissement obtenus ici, je pensais bien au MP-E 65, y a pas grand chose pour rivaliser chez Canon il me semble 🙂 Le 100 mm est bien aussi oui, j’ai la chance d’en posséder un également mais même avec des bagues-allonges, on n’est pas du tout dans les mêmes grossissements il me semble. En tout cas, chapeau pour la cicindèle, le rendu est bluffant, surtout avec du focus starking à main levée !!! Bravo à toi, j’aimerais être aussi habile 🙂

      2. Merci 🙂
        Pour le focus, c’est juste une question d’entrainement, même avec le 100 on peut en faire ! Je passe en manuel et j’avance petit à petit vers le sujet tout en faisant les images.
        J’ai aussi des bagues allonges, ça ne grossit pas autant que le MP-E à X5 mais c’est quand même pas mal, ça m’a permis de faire beaucoup d’images de collemboles.

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